J’essaye de pousser la purée agneau-tomate-aubergine dans sa bouche, et elle mâchonne d’un air circonspect. Puis elle chonchonne, et elle refuse de manger plus. J’essaye un peu d’eau. Elle boit, reprend une autre cuillère, puis commence à râler plus franchement. Je sais que le repas du midi est un moment difficile depuis ses 6 mois. On s’inquiète aussi pour sa courbe de poids (alors qu’elle a tout ce qu’il faut en réserve).
Elle a fait coup sur coup, à cause de l’entrée à la crèche, une gastro puis, là, une rhino-pharyngite.
On a appelé SOS médecin vendredi matin, en stress, parce que la fille d’une copine est hospitalisée pour une rhino qui a dégénéré en bronchiolite, et du coup on a peu peur.
J’ai pas dit que c’était totalement rationnel.
Là, devant ce qui est devenu des larmes de bébés, je m’avoue vaincu et donne du lait. On avait dit de diminuer. Est-ce qu’on va trop vite ? Est-ce que c’est seulement ce qu’il faut faire ?
Je ressens d’un coup un fossé entre mes connaissances et mes compétences.
Je pense à tout ces conseils que donnent les pédiatres et les bouquins, qui prennent une autre dimension une fois dans le concret. Il y a une différence nette entre écrire sur sa copie de partiel « en cas de rhino-pharingite, on a le dégagement au sérum physiologique facile » et se retrouver à lutter avec un bébé fort tonique à trois heures du matin pour ledit dégagement de nez et qu’elle puisse se rendormir.
J’ai une envie de hurler qui monte. Comme me dira une précieuse amie, après, « le problème c’est peut-être pas toi ou ta fille mais les injonctions qui t’ont été faites ». Ça m’a tranquillisé.
Je pense que ce qui sauve mon expérience de la parentalité, c’est les autres parents, surtout ceux avec qui on se suit sur Twitter. Des copines, des inconnues, mais des gens qui ont traversé la même galère (ou pire) et qui ont cette complicité bienveillante dont j’ai tant besoin dans ces situations.
Il faut que je lâche un peu plus prise. Apprendre à plier sans céder.
Franchement, merci.
Il va sans dire que tout autre type de conseil indélicat sur ma situation serait modéré à vu. N’essayez même pas.