Je sais qu’on ne commencera pas sans le café.
Il le fait lui-même. Vous acceptez une tasse, et il disparaît dans la cuisine pendant 10 minutes, on entend broyer, chauffer, filtrer, rouler et claquer des tiroirs. Sa chérie fait des blagues en attendant. Puis il revient, me pose la tasse fumante sur la table du salon. Je hume l’acidité, je prends une gorgée brûlante et je hoche la tête. Il s’assied enfin.
« Comment il s’appelle ce jeune homme ? » je demande en sortant une nouvelle feuille pour le dossier. Je feuillète le carnet de santé. « Et du coup, comment est-ce que ça s’est passé ? »
« On a essayé de suivre vos conseils, mais… » Il décide de lancer dans un récit. Son regard et sa voix sont encore pleins d’émotions contradictoires : culpabilité, joie, fierté ? Ses yeux sont brumeux, sa voix à moitié assurée.
Elle avait décidé, dans la tempête de ses contractions, d’aller prendre un bain. Quelques bougies, un peu de musique ; son chérie déployait des trésors de techniques pour l’accompagner. Elle se sentait bien dans son cocon.
« Vous vous souvenez qu’on avait parlé d’une limite pour partir à la maternité ? »
Elle s’est cabré dans l’eau chaude. Cette contraction était plus dure. L’idée d’aller aux urgences lui a traversé l’esprit.
« J’ai eu la flemme. »
Peu à peu ses réactions aux contractions se sont intensifiées. Elle souriait à son chérie, lui disait qu’il était merveilleux. Lui s’est senti mal à l’aise.
« Comme j’ai eu besoin d’aide, j’ai appelé le 15. »
J’essaye d’imaginer la scène. Il était minuit passé. Elle était sortie du bain, et les pompiers arrivèrent les premiers. Ils restèrent dans le hall, comprenant rapidement qu’un transport serait périlleux. Ils appelèrent le SAMU qui arriva peu après. Le médecin du SAMU se dit qu’il n’y avait pas grand-chose à faire, parce qu’elle avait commencé à pousser sur son lit, et que les accouchements n’était pas son fort. En même temps, est-ce qu’on peut lutter contre l’inévitable ?
Elle a poussé, tranquillement, avec son chéri à ses côté et le médecin dans la pièce, et son fils est né sur leurs draps défaits avant de rejoindre la poitrine de sa mère pour un premier accueil.
« En même temps, on avait parlé en préparation, mais les hôpitaux on n’aime pas trop ça.
− Par contre pour les suites de couches, c’était super ! Je suis super contente d’avoir été transférée. »
Je n’arrive pas à savoir si je dois les féliciter ou les gronder. Je fais un peu les deux en me marrant, et ils rient avec moi.
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Une réflexion sur “5 Oups”