« Je crois qu’on est à 21 cm.
− Oh, t’es radine, un peu. Je dirais plutôt 22-23… »
On est penché sur le ventre de la patiente avec mon étudiante sage-femme. Je lui fait un signe de sourcil pour lui dire d’abandonner. Ce n’est pas le moment de débattre.
La patiente : « C’est normal comme mesure ? Pourquoi vous trouvez pas pareil ? » Je remontre ma technique de mesure à cette dernière année, en descendant bien sur le pubis. Je ne veux pas qu’on discute des heures devant cette femme que je sais déjà assez anxieuse sur sa grossesse.
« Parfois on trouve des mesures différentes selon la façon de mesurer…
− Mais c’est moi qui ait raison, » dis-je.
L’étudiante pose la sonde sur le ventre et le son jaillit entre les murs du cabinet. Un galop rassurant, rien de plus à dire.
« Normalement vous faites l’écho dans trois semaines ?
− Oui. J’ai repris rendez-vous avec la même sage-femme ! Elle est super !
− Parfait. Et je vous rends votre dossier… Mais on se voit dans deux semaines pour commencer la préparation à la naissance ! Et on verra ce que dira l’échographie ! »
La carte vitale est passée, les questions de pas de porte posées, et avec mon étudiante on accompagne notre dernière patiente à la porte pour lui souhaiter un bon retour. Je télétransmets, elle file.
Deux semaines plus tard je suis devant le domicile de ma patiente et je sais déjà que ça va être compliqué.
Pas la préparation à la naissance. Je sais ce que le couple attend de moi… Et c’est le premier cours.
En fait j’ai reçu un texto dans la semaine, et j’ai répondu « nous en parlons jeudi matin ». Mon étudiante est en repos donc nous serons en petit comité.
Cette histoire de hauteur utérine la travaille.
La séance commence, et ils posent beaucoup de questions − l’ambiance est moins détendue que je ne l’aurais souhaité.
Après des allers-retours pendant la séance, d’autres sujets d’anxiétés qui remontent, on a juste conclu sur « j’ai confiance en mes mesures, et c’est d’ailleurs moi la sage-femme. On verra plus précisément à l’écho. »
L’échographie fut parfaite.
La patiente fut rassurée.
Et j’ai abordé le sujet avec mon étudiante sage-femme avec une montagne de pincette et de tact.
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