Elle est au milieu d’une garde de nuit, difficile parce que rapprochée des autres, quelque part entre la crèche et le bloc, quand son collègue lui propose une nouvelle patiente.
C’est pour lui, ou pour elle, mais cette patiente est douloureuse et ne dirait pas « non » à une péridurale.
Il se balance d’un pied sur l’autre, sans vraiment savoir quoi faire, et elle est une des titulaires.
Elle prendra en charge cette patiente.
« Mais tu lui mets son monitoring, et tu appelles l’anesthésiste. »
En revenant du bloc elle va se présenter au couple.
Ils sont beaux et confiants, ils attendent leur premier enfant.
Pas juste photogéniques : il émane d’eux une sorte de présence douce et chaleureuse.
« Trop d’ocytocine dans la pièce pour que ça soit respirable », me raconte-elle avec son sourire fatigué.
Le travail avance assez vite, lui la prend dans ses bras. Elle souffle doucement, il l’accompagne.
Quand arrive la fin du travail elle reste sur le côté et son bébé sort presque seul sous la poussée de sa mère. C’est presque trop facile. Elle le prendra en peau à peau où il rosira doucement, puis le mettra doucement au sein.
« Je me suis sentie presque inutile. C’était juste… Physiologique. Je ne suis même pas sure qu’ils se souviendront de moi.
− La meilleure sage-femme, ce n’est pas celle qu’on oublie ? »
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